Quelques éléments récurrents dans les dessins de Nkanga réfèrent aux paysages et aux cartes topographiques, aux aiguilles, aux nuanciers, aux corps ou parties de corps qui se métamorphosent. À travers ses dessins, Nkanga analyse ou décrit des éléments que les mots ne peuvent pas exprimer. Souvent, ses dessins constituent des études préliminaires ou une documentation de ses performances.

Les aiguilles qui paraissent transpercer bon nombre de ses dessins symbolisent le besoin des êtres humains d’assujettir la terre à leur volonté. Autrefois, ce furent les Occidentaux qui sillonnaient les mers et les continents pour s’approprier des territoires sans aucune concertation avec la population autochtone. Une aiguille sur une mappemonde indiquait le territoire que l’on s’était approprié.

Par ailleurs, les aiguilles renvoient aussi à l’aspiration de Nkanga de sonder le monde et d’analyser en profondeur tous les mystères. Les œuvres de Nkanga se situent souvent à la frontière entre l’histoire coloniale et sa propre interprétation de l’Histoire.

L’étude de la terre (à différents niveaux : géologique, minéralogique, cartographique, économique…) néglige souvent l’être humain. On analyse des strates, on extrait des minéraux, on calcule des bénéfices, on fore le sol, on transporte des matières premières, on abat des forêts et on laisse d’énormes cicatrices. Ces procédés sont planifiés et étudiés, mais l’impact sur l’homme est souvent considéré comme accessoire, voire sans importance. Celui qui a planté une aiguille est le propriétaire du territoire et peut donc en faire ce qu’il veut. Ils sont indifférents à toute autre affectation de la terre susceptible d’assurer l’existence de plus larges communautés, insensibles à l’importance attachée aux coutumes, usages, rituels et au vécu des habitants. La valeur ne résulte pas seulement de transactions financières, mais peut être liée à la culture ou à la connaissance. L’économique, le socio-culturel et le politique sont étroitement liés et ce sont précisément ces liens que Nkanga veut dévoiler.

Les nuanciers qu’on aperçoit souvent sur les dessins font en quelque sorte fonction de fenêtre de dégagement ; ils permettent de voir le patchwork de couleurs à partir duquel la réalisation de l’œuvre est enclenchée.