Jan Fabre
Mur de la montée des anges, 1993-1993
L’Anversois Jan Fabre (°1958), artiste plasticien, chorégraphe et metteur en scène de théâtre est un phénomène artistique aux multiples visages. Performeur énergique, il explore et repousse les frontières de ce que permet le théâtre. Plasticien assidu, il crée, à la faveur d’insectes, de scarabées, de dessins au stylo à bille, etc., des univers qui fourmillent de références mystiques, de métamorphoses et de personnifications. Dans l’exposition Sanguine/Bloedrood, ses deux dessins de sang renvoient directement à ses performances provocatrices du début des années 80, lorsque son corps faisait office de laboratoire expérimental pour exprimer la vitalité criante de l’existence. Pulsions, désirs, beauté et mortalité sont ses thèmes récurrents, aussi bien dans ses productions scéniques que ses œuvres plastiques. L’imbrication des deux se révèle déjà en 1978 dans la performance My body, my blood, my landscape : sur scène, l’artiste taillade son propre corps et avec le sang qu’il recueille, il crée ses premiers dessins de sang. Dans les années qui suivent, il façonne des robes de mariée en élytres de scarabées bleu vert, griffonne des dessins au stylo à bille à l’encre bleu nuit et réalise des sculptures dorées d’animaux et de crânes. Fabre fantasme, sublime et étale, mais la beauté aveuglante de ses créations dissimule toujours un autre monde, un au-delà animal et sanglant. Dans ses œuvres apparaissent souvent des anges, des guerriers, des squelettes et des animaux ; des messagers déguisés qui surgissent du passé pour nous rappeler la décrépitude et la perte, le sang et la souffrance, la part d’animalité en l’homme et la part d’humanité dans l’animal. Son intérêt intense pour les insectes apparaît déjà dans quelques collages et dessins de scarabées et araignées de la fin des années soixante-dix, mais ne s’exprime que durant les années quatre-vingt-dix quand il modèle son Mur féérique de la montée des anges, une robe de mariée élégante de scarabées métalliques de bois de Thaïlande verts-bleus. Elle montre la beauté romantique d’une silhouette féminine mais la forme ultralégère n’est retenue que par la conscience envahissante d’un caractère éphémère. Luc Tuymans voit dans le petit format des dessins de sang un geste à la fois humble et grandiose : une trace de sang comme résidu des écrits personnels de Jan Fabre.